Mon histoire, une rigolade, sérieux

« Pour combien de temps ? » mes pieds frappent contre le sol, mes yeux butent sur une trainée de poussière sur l’meuble qui me devance. Qui est à l’appareil ? Mon frangin, de sept ans mon aîné, sept ans et probablement 186 point d’QI en plus, aussi. Il est doc’ quelque part, près de NY. Pas pour très longtemps, il s’barre en Afrique, jouer les médecins sans frontière et l’frérot, lui, il récupère la gamine. Ma nièce, j’espère seulement qu’elle saura se tenir à carreaux.

La sonnerie de la porte d’entré retentit. Je me précipite pour ouvrir, les yeux ronds, je fais fasse à une mioche : « Bonjour oncle Géraden ! » J’arque un sourcil, suspicieux : « Tu es…Abigail Rose ? » un sourire étire ses lèvres : « Oui, 1ère du nom ». Je me passe une main sur le visage : « Ow…J’t’imaginais pas comme ça » « C’est-à-dire ? ». J’hésite et puis, merde, sérieusement : « A peine haute comme trois pommes, plus près du sol que du ciel. J’t’imaginais pas…gosse. J’pensais adolescente. BORDEL, va falloir que j’te prépare à manger, régulièrement ? ». Un rire s’échappe d’entre ses lèvres, mutin : « On dirait ». Je me décale, la laisse entrer « PAS POSSIBLE, gamine. T’vois autour de toi ? » Elle hoche la tête, coiffée de deux couettes ringardes, tuez-moi : « Oui » « Y’a pas une seule plante verte, pas un seul animal de compagnie, t’vois c’bocal ? ». Son regard se plante dessus : « Bah l’dernier poisson rouge qui y a vécu remonte à l’an 40 et j’suis sûr qu’il n’est pas mort de vieillesse ! » « Ne t’inquiète pas, oncle Géraden, j’prends très peu de place ». C’est censé me rassurer ? « Knock, c'Knock pas Géraden. Allez, viens. Tu pourrais te perdre dans cette maison, reste auprès de moi. J’vais te faire visiter puisque j’n’ai pas l’choix ».


« Oncle Knock » Je pousse un grognement, je lui fais place sur l’canapé, près de moi : « Je me disais… » « J’te vois venir, n’essaye même pas de ma caser avec ton institutrice ». Surprise, on dirait que je lui ai coupé la chique : « Pourquoi ? Elle est très réceptive à ton charme atypique ». Mes yeux se posent sur elle, hallucinés : « D’où tu sors ça ? ». Elle balance ses petits pieds au-dessus du sol : « C’est elle qui la dit à une de ses collègues », je la défis du regard : « …pendant la récréation » mais encore : « au moment où j’ai –malencontreusement- oublié mon goûter dans mon sac » vraiment ? J’crois pas, non, j’crois pas, je connais la bestiole : « …dans la salle où elles discutaient toutes les deux ». Où est-ce qu’elle a appris à s’comporter de la sorte ? « Va falloir t’apprendre quelques règles à suivre » « Comme quand oncle Sawyer ramène des packs de bière à 2 heures du matin ? » « T’es qui , hein ? Agent secret ? ». Les mioches, de nos jours.



Règle n° 1 (et seule règle à retenir) : Ne jamais accepter d’accueillir des gamins sous vot’ toit, jamais, proscrire l’idée même de vouloir « être sympa ». INTERDICTION d’être sympa, pour votre salut.

Avoir un enfant qui dort dans la piaule d’à côté, c’est dire adieu aux parties de jambes en l’air : « Salut ». Je sursaute : « N’fais pas attention à elle, elle fait partie de la décoration ». Les gros yeux que j’fais n’ont pas l’air de dissuader la bête : « Je peux jouer les pots de fleurs, les portemanteaux, les tables basses ! » lance-t-elle enthousiaste, avec zèle : « Monte dans ta chambre » je crache, la lèvre supérieure relevée. La partie de jambe en l’air se transforme en partie de jumanjii. J’avais pas c’genre de jeu en tête mais, remarquez, jl’ai bien cherché, c’est moi qui ai dit « oui »

« Je t’ai cherché pendant DEUX heures, bordel, tu étais où ? ». Je brasse de l’air, l’inquiétude lisible jusque dans ma façon de respirer. J’ai paniqué, ouai, j’ai paniqué parce que dans toute ma putain d’vie, je n’ai jamais été capable de protéger quelqu’un. La preuve, mes vieux, ça aurait dû être moi, au volant du pickup, pas eux. Les traits crispés, je lui fais face, prêt à secouer ce maudit microbe de 10 ans, je serai capable de chialer de soulagement : « Mais, je t’avais prévenu que j’irai jouer chez Sadie ». Sadie ? C’qui ça ? Et puis, n’importe quoi, sinon, je m’en serai souvenu. J’suis peut être limité mais j’suis loin d’être abruti fini : « Arrête de mentir » « Si, hier » « Hier quand, hein ? » « Pendant que tu criais « ALLEZ LES BAYBEARS » ». Elle est folle cette gamine ? M’poser une question alors que je regarde un match de baseball à la télévision ? WTF ? C’est chercher la merde. Je souffle : ma faute donc rien à ajouter. Compris.

Mes matins ne se ressemblent plus, mes soirs non plus. Au réveil, une bise vient se perdre sur ma joue, au coucher, une autre. Le programme télé est rythmé par disney channel et autre chaîne neuhneuh. Le dîner ? Spaghetti, frites et…ouai, bon ça , ça n’a pas trop changé. « Oncle Knock » « Quoi ENCORE ? » « C’vrai que tu as une « petite bite » ? » Je recrache le contenu de ma bouche : « Bordel, c’qui qui a dit ça ? » « Rochelle, la serveuse du snack, elle a aussi dit que tu étais un « pervers » » « Chiure, faut lui faire quoi à cette roulure pour qu’elle ferme sa grande gueule ? » Rhétorique la question, évidemment, morpion ne sait pas : « J’crois qu’elle en pince pour toi ». Tu m’étonnes : « Ma chérie, tu ferais bien d’apprendre qu’elle en pince pour tout les individus à pénis du coin et parfois même pour les filles…fais gaffe à toi ». Je décide de mettre fin à cette conversation avant qu’elle décide de me demander « comment est-ce qu’on fait des bébés » remarquez, elle sait d'jà l’noms des engins utilisés, l’travail est mâché. Maggle, je sais.

« Knox, Abigail se vante d’avoir une vie très instructive à tes côtés » mon frère, perdu en plein milieu d’un campement masaï, ils ont l’téléphone là-bas ? Ces asiatiques, ils sont trop forts. « Tsé bien, elle est trop éveillée cette fillette ». Plus que je ne l’étais à son âge : « Knock, je te connais, évite les excès devant ma fille ». Oui, branleur, ta gosse, c’ma gosse et le pire : c’est que je m’y attache, un peu trop à mon goût.


L'frangin il flippe pour sa gosse : compréhensible mais en même temps : t'envoie ton morpion à des milliers de kilomètres de là d'où il vient, direction Peth Australie pour rejoindre un oncle attardé qui n'a même pas de situation stable, ça s'appelle chercher la merde. « Gidéon, c'bon : Abigael, j'en fais mon trésor .» Il souffle, il a enfin compris ce que ça signifie. Il me connait, il sait comment je fonctionne pour la protéger , en gros, j'donnerai ma vie, point à la ligne.

A la mort de mes vieux, pas loin de mes 15 ans, j'ai décidé de réaliser mon rêve. L'lycée, les études à rallonge, les études courtes BREF les études tout court ça n'a jamais été mon dada. J'ai claqué la porte de ma tutrice , j'ai fait l'trajet jusqu'à malibu et j'y suis resté 5 ans avant de voir mes vents tourner et payer ce putain de billet d'avion pour Sydney. Les on-dits m'ont poussé à v'nir à Peth et depuis, je parasite le coin, enchaînant boulot après boulot. J'suis loin des championnat de Surf, loin d'ceux d'Skate. Sommes toutes : into the shit.

Alors, j'vous plais ? Et physiquement ? PARCE QUE JE SUIS ARCHI LIBRE. Voilà, c'était pour préciser. Maintenant j'vous dis fuck, j'y vais.